Remous au sommet de l’État : La réponse très intelligente du président Bassirou Diomaye Faye

Face à l’agitation qui secoue le sommet de l’État, le président Bassirou Diomaye Faye choisit le silence. Pour L’Observateur, ce choix n’est pas neutre : il constitue une réponse stratégique à une situation politique marquée par une tension particulière autour du Premier ministre Ousmane Sonko. Entre maîtrise du pouvoir et tempête annoncée, ce silence intrigue et suscite analyses et spéculations au plus haut niveau.

Comme lors de la première escarmouche, les Sénégalais ont été informés de la situation presque par surprise, témoins d’un champ de bataille où les lignes se dessinent sans prévenir. Une conférence de presse du leader de Pastef et chef du gouvernement, organisée en marge de l’installation des membres du comité exécutif du parti, avait alors été consacrée à son différend avec le président Diomaye, dénonçant l’absence d’autorité au sommet de l’État. Cette fois encore, les événements semblent suivre les mêmes contours d’une crise dont l’issue reste incertaine.

L’affrontement, jusque-là feutré, a pris une intensité nouvelle depuis la sortie du ministre de l’Environnement, Abdourahmane Diouf, sur Radio Sénégal Internationale, exhortant le chef de l’État à « prendre ses responsabilités ». Une charge politique perçue comme un signe d’escalade, survenant moins de 24 heures après l’appel du Premier ministre Ousmane Sonko aux militants du Pastef pour se mobiliser lors du Terameeting prévu le 8 novembre à Dakar. Selon L’Observateur, cette démonstration de force semble faire écho aux rumeurs circulant dans les couloirs du pouvoir, selon lesquelles Sonko aurait rencontré les députés de Pastef pour leur assurer qu’il ne démissionnerait pas avant d’éventuelles mesures de destitution du président Diomaye.

Face à cette tempête, le Président Bassirou Diomaye Faye demeure silencieux, campé sur ses positions, observant le champ de bataille. Un silence qui interroge et inquiète : marque d’une maîtrise politique sans faille ou prélude d’une tempête au sommet de l’État ?

Pour Sahite Gaye, enseignant-chercheur au CESTI et spécialiste en communication de crise, ce silence peut être interprété comme une volonté de ne pas alimenter les tensions. « En refusant de réagir publiquement aux provocations et aux critiques, le Président Bassirou Diomaye Faye évite d’envenimer les conflits internes, notamment avec son Premier ministre, Ousmane Sonko. C’est aussi une manière de préserver l’autorité présidentielle et de ne pas s’engager dans des querelles qui pourraient affaiblir son image ou celle de l’État », explique-t-il à L’Observateur.

Selon M. Gaye, le silence est aussi symbolique : il traduit maîtrise de soi, sagesse et contrôle du récit. « Un chef d’État qui parle peu peut apparaître plus puissant et plus fort que prévu », souligne-t-il, rappelant que Diomaye ne suit pas le rythme des réseaux sociaux pour répondre à toutes les sorties, ce qui lui permet de rester maître du tempo.

Le journaliste et analyste politique Pape Amadou Fall partage ce point de vue. Pour lui, le silence du président honore la fonction présidentielle face à une agitation grandissante dans le camp gouvernemental. « Quand l’agitation prend de l’ampleur, la réserve, surtout pour un chef d’État, s’impose. Il faut savoir laisser courir, laisser parier et prendre le recul nécessaire pour définir soi-même le tempo », confie-t-il à L’Observateur.

Cependant, Pape Amadou Fall rappelle que cette agitation au sommet de l’État ne date pas d’aujourd’hui. Selon lui, certaines séquences passées, comme des choix lors du remaniement ministériel ou la redistribution de pouvoirs au Premier ministre, laissent présager que les manœuvres dans l’ombre pourraient aller loin. « Tout n’est pas rose dans les relations entre le président et son Premier ministre. Mais le silence du président reflète sa personnalité et son tempo. Il n’a pas la virulence de Sonko et reste dans une conduite mesurée », explique l’analyste politique.

Enfin, Pape Amadou Fall souligne que, malgré le soutien d’Ousmane Sonko lors de son accession à la magistrature suprême, « Diomaye a toute la légitimité pour exercer son pouvoir ». Néanmoins, l’analyste avertit que, d’ici 2029, beaucoup d’eau coulera encore sous les ponts. « Ce silence face à l’agitation peut être un signe avant-coureur d’une tempête politique. L’exercice du pouvoir est complexe et tout peut arriver. Une fracture nette au sommet de l’État pourrait avoir des conséquences terribles pour le Sénégal », conclut-il à L’Observateur.

source/AFP