La Section de recherches poursuit ses investigations sur les violences politiques qui ont endeuillé le Sénégal entre 2021 et 2024. Selon des informations rapportées par le journal L’Observateur, cinq familles de disparus se sont présentées, ce lundi, devant les enquêteurs pour livrer leurs témoignages, empreints de douleur, d’injustice et d’attente de vérité. Ces auditions s’inscrivent dans le cadre d’une enquête visant à faire toute la lumière sur les morts, disparitions et bavures présumées survenues durant cette période de fortes tensions politiques.
D’après L’Observateur, après une première vague d’auditions des parties civiles vendredi dernier, ce lundi 6 octobre marque une nouvelle étape. Cinq familles ont répondu à la convocation de la Section de recherches, portant avec elles le poids d’absences irréparables et de souffrances encore vives. Les récits recueillis par les enquêteurs peignent le tableau d’un pays marqué par les fractures sociales et les blessures humaines laissées par ces années de violence.
Bassirou Sarr, tailleur au grand cœur, emporté après un dernier geste d’amour filial
Parmi les familles entendues figure celle de Bassirou Sarr, tailleur trentenaire connu pour sa générosité. Selon les précisions de L’Observateur, il avait offert un peu d’argent à sa mère, Mbada Diouf, juste avant sa mort. À l’époque, son témoignage avait été recueilli par la Maison des Jeunes Reporters, dans le cadre du projet CartograFree Sénégal, qui retraçait les victimes des violences. « Le jour de son décès, il m’avait offert de l’argent. Il était d’un soutien indéfectible. Perdre son enfant dans de telles circonstances est une douleur incommensurable », confiait sa mère, la voix tremblante. Ce lundi, c’est son père, Issa Sarr, qui est convoqué pour livrer sa version des faits devant les enquêteurs.
Mor Nguère Ndiaye, jeune footballeur fauché par une balle réelle de 9 mm
La deuxième famille à se présenter est celle de Mor Nguère Ndiaye, 22 ans, passionné de football. Comme le rapporte L’Observateur, le jeune homme avait quitté son domicile le 1er juin, vers 18h25, pour rejoindre un terrain de football proche de chez lui, en rassurant sa mère qu’il éviterait les affrontements. Mais quelques minutes plus tard, il se retrouve pris dans une course-poursuite entre manifestants et policiers. Une balle de 9 mm l’atteint à la mâchoire. Transporté d’urgence à l’hôpital de Thiaroye, il succombera à 01h30 du matin. « Le médecin a confirmé que Mor a été touché par une balle réelle », a confié son père, Assane Ndiaye, également convoqué ce lundi par la Section de recherches.
Cheikhouna Ndiaye, poignardé lors des manifestations aux Parcelles Assainies
Toujours selon L’Observateur, la famille de Cheikhouna Ndiaye a également été entendue. Sa sœur aînée, Aminata Ndiaye, s’est exprimée pour réclamer justice. Cheikhouna, 22 ans, vendeur de carreaux et orphelin de père et de mère, avait été poignardé alors qu’il rentrait du travail le 4 mars 2021, lors des manifestations aux Parcelles Assainies. La thèse d’une agression isolée reste controversée. Ses effets personnels — un téléphone, 25 000 FCFA et sa sacoche — avaient été retrouvés intacts, laissant planer le doute sur les véritables circonstances de son décès. Depuis ce drame, Aminata Ndiaye réclame que « toute la lumière soit faite sur cette mort suspecte ».
Idrissa Ouédrago et Abdoulaye Faye : deux mères unies dans la douleur
Deux autres familles ont été reçues dans la salle d’audition, relate L’Observateur. Celle d’Idrissa Ouédrago — également connu sous le nom d’Ibrahima Drago, selon d’autres sources —, tué par balle le 2 juin à Pikine, représentée par sa mère Astou Ndiaye, et celle d’Abdoulaye Faye, accompagnée de sa mère Adji Ndella Faye. Toutes deux, éplorées, ont livré des témoignages poignants, confrontant les enquêteurs à la froide réalité de leurs pertes et à l’urgence de vérité qu’elles réclament depuis des années.
Lassana Diarisso, un destin brisé au cœur des violences
Selon L’Observateur, ce mardi, ce sera au tour de la famille de Lassana Diarisso, surnommé « Lass », de se présenter devant la Section de recherches. Son corps sans vie avait été retrouvé abandonné. Très connu dans son quartier, Lassana avait été aperçu pour la dernière fois à l’arrêt Keur Mbaye Fall du TER. Ce jour-là, il était allé garer sa voiture pour éviter des actes de vandalisme. Sur le chemin du retour, il aurait été percuté par un véhicule des forces de l’ordre, selon les témoignages recueillis. Grièvement blessé, il aurait ensuite été pris en charge par des gendarmes de la Légion d’intervention de Mbao, avant d’être conduit à la Brigade du TER.
Toujours d’après L’Observateur, ses proches soutiennent que le jeune homme aurait subi des sévices durant son transfert. Ce mardi, c’est son frère, Diadié Diarisso, qui sera entendu par les enquêteurs, portant à nouveau le poids d’une famille confrontée à la violence institutionnelle et à une injustice persistante.
Source/Senenews
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