Lors d’un dîner-débat organisé par l’Association des Journalistes en Santé, Population et Développement (AJSPD) en partenariat avec l’International Budget Partnership (IBP), experts, décideurs et acteurs de la société civile ont exploré les moyens de financer durablement la santé au Sénégal. « L’argent seul ne suffira pas, mais sans argent bien orienté, il n’y aura pas de couverture sanitaire universelle », a résumé la problématique.
Un système de santé sous pression
Malgré des progrès récents, le financement de la santé reste fragile et inéquitable, avec plus de 43 % des dépenses supportées par les ménages et seulement 25 % des besoins couverts par les partenaires techniques et financiers. Cette situation met en péril la viabilité de la Couverture Santé Universelle (CSU), pilier de la Vision Sénégal 2050. Les défis sont connus : un déficit criant de ressources humaines (7 médecins pour 10 000 habitants contre 15 recommandés par l’OMS), des inégalités marquées entre zones urbaines et rurales, une dépendance excessive aux financements extérieurs, et la coexistence de maladies transmissibles et chroniques.Pour Assietou Diallo Fall, économiste de la santé au ministère de la Santé et de l’Action sociale, « renforcer le capital humain et responsabiliser les territoires » est urgent. Sans une réforme profonde du financement, ces ambitions risquent de rester lettre morte.
La pertinence avant les budgets
Dr Farba Lamine Sall, expert en santé, a insisté : « Le problème n’est pas d’abord l’argent, mais la pertinence des politiques et des programmes. » Selon lui, « réduire la santé à une équation budgétaire est une erreur : ce qui compte, c’est d’investir dans des programmes efficaces et durables. » Il a déploré que la santé, bien que proclamée priorité nationale, représente moins de 5 % du budget de l’État, un niveau incompatible avec l’objectif d’un système inclusif et performant. Pour Dr Sall, l’alternance politique doit marquer une rupture : « Ce qu’on faisait jusqu’ici, on n’en veut plus. L’avenir, c’est la CSU, avec le principe de ne laisser personne de côté. »
Il propose trois piliers : renforcer l’offre de soins en mobilisant les secteurs public et privé, protéger financièrement les populations via une assurance maladie obligatoire (le volontariat ayant montré ses limites), et réduire la morbidité grâce à la prévention et à l’éducation sanitaire.Souveraineté sanitaire et confianceLes débats ont aussi mis l’accent sur la souveraineté thérapeutique : développer l’industrie pharmaceutique locale, moderniser les plateaux techniques et restaurer la confiance dans les hôpitaux sénégalais. « Tant que nos citoyens douteront de leurs structures, ils chercheront à se faire soigner ailleurs », a averti Dr Farba Sall.
Enfin, les experts ont souligné le rôle clé de l’information et de la communication. « Beaucoup de problèmes de santé sont liés au manque d’information », a reconnu Dr Sall, recommandant que le ministère de la Santé devienne une source centrale d’information et de coordination, en collaborant avec les médias et la société civile pour amplifier les messages de prévention.











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