Lancé en mars dernier, le processus d’élaboration de la Loi d’Orientation sur l’Autonomisation Économique des Femmes (LOAEF), a pris sa vitesse de croisière. Le rapport de l’étude diagnostique et l’avant-projet de loi ont été consolidés et validés, ce jeudi 18 décembre, lors d’un atelier de partage présidé par le ministre de la Femme, Maïmouna Dièye et les autres partenaires financiers tels que l’Agence belge de coopération internationale (Enabel), l’Union européenne, le Projet d’Appui aux Jeunes et aux Femmes (PAJEF) et Onu-Femme.
Une avancée majeure dans le processus d’adoption de ce cadre normatif solide qui garantit aux femmes l’accès aux ressources et financements. Une loi qui « vient à son heure », se réjouit Maïmouna Diouf, présidente de l’association nationale des femmes restauratrices. Ce, en ce sens, qu’elle corrige une injustice qui persiste.
Au Sénégal, les femmes représentent près de 39 % de la population active, contribuent à 80 % de la production agricole et occupent environ 70 % du secteur informel au Sénégal. Malgré cette contribution significative à l’économie nationale, elles demeurent confrontées à de fortes inégalités structurelles, notamment en matière d’accès aux ressources productives, à la propriété foncière, au financement, à la formation et à l’emploi décent. Des plafonds de verre que la loi d’orientation entend crever très prochainement, assure le ministre Maïmouna Dièye.
Prenant la parole lors de cette rencontre, elle a d’emblée souligné : « il a été constaté que l’autonomisation des femmes est quasiment un objectif transversal à toutes les politiques publiques et malgré les nombreuses stratégie d’intervention des structures de l’État, les résultats restent faibles et il n’y a pas d’impact. Dès lors, il s’est posé la nécessité de mettre en cohérence toutes ces initiatives, d’harmoniser les interventions pour atteindre le l’impact visé ». C’est dans ce contexte qu’est intervenue la formulation de la loi d’orientation sur l’autonomisation économique des femmes qui participe pleinement à la mise en œuvre de la vision Sénégal 2050 référentiel des politiques publiques de notre pays, précise-t-elle.
Ce processus d’élaboration de la loi d’orientation a démarré par la tenue de cadres régionaux de concertation dans les 14 régions du Sénégal. Ces consultations ont permis de recueillir les réalités vécues pour par les femmes, leur aspiration ainsi que les contributions des acteurs locaux en droite ligne avec l’esprit de territorialisation. L’étude diagnostique qui en est issue, confie-t-elle, « met en évidence les défis persistants liés à l’accès des femmes aux ressources productives, aux finances à la formation, à l’emploi des et à l’entrepreneuriat ».
L’équation du suivi après adoption
Un cadre normatif solide en faveur de l’autonomisation économique des femmes est certes une grande avancée mais il saurait suffire pour garantir l’effectivité matérielle de l’esprit de la loi. Ainsi, la phase post-adoption de la loi est à anticiper. C’est du moins l’avis de Abou El Mahassine FASSI-FIHRI, directeur pays d’Enabel.
« Cette phase post-adoption est souvent une phase déterminante pour un impact réel de la loi, notamment anticiper l’élaboration des textes d’application, la clarification des rôles institutionnels et la mise en place ou le renforcement d’un dispositif de suivi », met-il en garde s’engageant à apporter à la tutelle tout l’appui nécessaire.
Objectifs stratégiques de la loi à l’horizon 2035
Selon les résultats de l’étude diagnostique, le gouvernement a défini des cibles précises pour transformer la participation économique des femmes. L’objectif est d’atteindre un taux d’emploi des femmes de 60 % d’ici 2035, alors qu’il n’était que de 34 % en 2018. La proportion de femmes chefs d’entreprise doit également passer à 40 %, contre 20,4 % en 2015.
S’agissant de l’éducation et l’accès aux ressources, il est noté que malgré une amélioration de la scolarisation, des disparités structurelles persistent. L’accès à l’enseignement élémentaire pour les filles a progressé, passant de 88,6 % en 2008 à 93,86 % en 2017. Le taux d’alphabétisation demeure nettement inférieur chez les femmes (40 %) par rapport aux hommes (65 %). Une grande majorité de femmes (57 %) sont sans instruction, contre 53 % des hommes. Seulement 12,1 % des chefs de ménages agricoles sont des femmes en 2023.
Il en découle également que la participation des femmes au marché du travail est de 34,5 %, loin derrière les hommes (58 %). Le chômage touche 22,1 % des femmes, soit plus du double du taux masculin (9,6 %). L’immense majorité des femmes entrepreneures (94,1 %) opèrent dans le secteur informel. Les femmes sont propriétaires majoritaires de seulement 11,8 % des entreprises et n’occupent que 14,1 % des postes de « Top Managers ». Dans la fonction publique, les femmes représentaient 55 % des nouveaux recrutements en 2020.
L’État veut un changement de paradigme et il s’articule autour de la loi d’orientation qui vient d’être validée. Elle sera bientôt sur la table des autorités pour une adoption en conseil des ministres avant de passer à l’Assemblée nationale.












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