Mbeubeuss, vaste décharge située dans la banlieue dakaroise, est devenue, au fil des décennies, un véritable défi environnemental. Source majeure de pollution atmosphérique, hydrique et sociale, ce site à ciel ouvert cristallise aujourd’hui l’urgence d’une réforme profonde de la gestion des déchets au Sénégal.
C’est dans ce contexte critique qu’un modèle venu de Chine, Erhai Environnement, se présente comme une source d’inspiration concrète pour une transformation durable du système.
Une réponse intégrée à la crise des déchets
Créée en 2005 dans le bassin du lac Erhai de Dali, dans la province du Yunnan (sud-ouest de la Chine), l’entreprise Shunfeng Erhai Environnement est spécialisée dans la valorisation complète des déchets organiques. Ce modèle repose sur un principe simple, mais révolutionnaire : ne rien perdre, tout transformer. Déjections animales, restes alimentaires, boues d’épuration, algues mortes, tiges agricoles ou encore sédiments lacustres sont collectés, triés, traités, puis transformés en produits utiles comme le biogaz, l’engrais bio, amendements de sol, ou encore substrats de culture.
À ce jour, plus de trois millions de tonnes de déchets organiques ont été recyclées dans le bassin du lac Erhai. Ce qui a permis d’obtenir un résultat de 400 000 t de CO? évitées chaque année et un revenu annuel estimé à 20 millions de yuans (plus de 15 milliards F CFA) issus du marché de la compensation carbone.
Une entreprise au cœur de l’innovation écologique
Ce succès repose sur la recherche scientifique, l’ingénierie locale et la gouvernance territoriale. L’entreprise, aujourd’hui forte de 16 filiales et de près de 2 000 employés, a noué des partenariats avec les plus grandes universités agricoles chinoises et détient 104 brevets technologiques. Elle est intégrée à tous les niveaux de la chaîne de valeur notamment la collecte, le traitement, la valorisation, la distribution, l’énergie et la recherche.
Son système logistique autonome, ses accords avec les producteurs de déchets, sa couverture totale des déchets de cuisine dans la préfecture de Dali ainsi que son intervention dans les zones humides, garantissent une gestion continue, sans rupture ni gaspillage. Le modèle repose sur huit grands systèmes intégrés, allant du transport à la promotion des produits, en passant par la recherche, la gestion et l’innovation.
Un modèle reproductible, à transposer à Mbeubeuss ?
Face à la saturation de Mbeubeuss et à l’impact écologique croissant de cette décharge historique, le modèle d’Erhai Environnement offre des enseignements concrets. Là où Mbeubeuss reste encore dans une logique de stockage massif et de gestion artisanale, Erhai propose une économie circulaire locale, bas carbone où le déchet devient ressource.
Ce modèle, reconnu par le ministère chinois de l’Agriculture et des Affaires rurales comme l’un des cinq meilleurs du pays, a également été inscrit au programme national des villes sans déchets. Il est aujourd’hui exportable et pourrait être adapté à d’autres contextes urbains, comme Dakar, à condition de créer une volonté politique, un cadre juridique adapté et des investissements structurants.
Avec ce modèle, Mbeubeuss qui compte des centaines de tonnes de déchets produits chaque jour peut devenir un site pilote africain de reconversion écologique, à l’image de Shunfeng Erhai.
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